samedi 7 mai 2011

Confucius : l'incontournable Maître K'ong en Corée, en Chine et au Vietnam... Morale confucéenne, quand tu nous tiens !...

(((NB : BILLET COMPTE TRIPLE... NE ZAPPEZ PAS...
 AMIS DES FLUX READERS NE ME ZAPPEZ PAS ! CE BILLET EST EXCEPTIONNELLEMENT LONG, ET JE PROMETS DES BILLETS PLUS COURTS ET PLUS PERSONNELS POUR LA SUITE DE CE BLOG!)))

Pourquoi s'intéresser à la philosophie de Maître K'ong (Confucius) ?
(pour être brillant et original en dissert de philo ?)
 

Philosophie morale plus que religion, le confucianisme est incontournable pour comprendre le mode de fonctionnement socio-familial de certaines sociétés d'Asie, en particulier en Corée, en Chine et au Vietnam. Amis du monde l'adoption, ce billet compte donc triple (quantitativement et qualitativement)...

Confucius est une figure majeure en Asie aux mêmes titres que Jésus et Platon en Occident.

Même si l'importance des principes moralistes confucéens a quelque peu décliné en République populaire de Chine suite à la Révolution culturelle, l'influence latente que le confucianisme exerce encore de nos jours par exemple sur le modèle social de la Corée du Sud mais aussi du Japon et du Vietnam (respect des ancêtres, piété filiale, obéissance aux aînés, patriarcat, etc ...), est centrale.

Si vous êtes motivés pour lire la longue suite.... Surtout n'hésitez pas...
Sinon, encore une fois, ne me zappez pas...




Le confucianisme, Rújiā « école des lettrés » puis Rúxué « enseignement des lettrés » Rúxué, est l'une des plus grandes écoles philosophiques, morales, politiques et dans une moindre mesure religieuses de Chine. Elle s'est développée pendant plus de deux millénaires à partir de l'œuvre attribuée au philosophe Kongfuzi, « Maître K'ong » (551-479 av. J.-C.), connu en Occident sous le nom latinisé de Confucius par les Jésuites.

Après avoir été confrontée aux écoles de pensée concurrentes pendant la Période des Royaumes combattants et violemment combattue sous le règne de Qin Shi Huang, fondateur du premier empire, elle fut imposée par l'empereur Han Wudi (-156 ~-87) en tant que doctrine d'État et l'est restée jusqu'à la fondation de la République de Chine (1911). Elle a aussi pénétré au Vietnam, en Corée et au Japon où elle a été adaptée aux circonstances locales.

À partir du milieu du IXe siècle se sont dégagés divers courants constituant le néoconfucianisme (Lǐxué, Dàoxué, Xīnxué etc.) qui en est devenu la version officielle au XIIIe siècle. Sous la dynastie Qing est apparu le Hànxué critique du néoconfucianisme, puis au XXe siècle, le nouveau confucianisme.

L'influence de Confucius en Asie orientale est telle qu'on peut la comparer à celles de Platon et Jésus en Occident. Il n'est pas le fondateur d'une religion, mais a créé avec ses disciples, sur la base de la pensée de son époque, dont l'universisme, un système rituel achevé et une doctrine à la fois morale et sociale, capable de remédier selon lui à la décadence spirituelle de la Chine de l'époque.

Confucius

La relation entre le confucianisme et Confucius lui-même est ténue.

Le confucianisme a profondément influencé l'Asie orientale durant 20 siècles, néanmoins, les idées de Confucius n'ont pas été acceptées durant sa vie et il a souvent déploré le fait qu'il ne trouvait aucun maître à servir. De même que pour de nombreuses autres figures historiques majeures (Bouddha, Socrate, Jésus, Mahomet ...), on ne dispose pas de traces directes de ses idées ; ne sont parvenues jusqu'à nous que des paroles et des pensées recueillies par ses disciples dans un unique ouvrage : Les Analectes ou Entretiens de Confucius.

Le confucianisme s’est développé à partir de l’interprétation qu’ont faite ses successeurs des thèmes des Analectes, mais aussi d’autres textes, appelés Cinq classiques, dont la rédaction, la compilation ou le commentaire lui étaient attribués à tort  : Shijing, Shujing, Yijing, Lijing, Chunqiu. Le problème est aggravé par la vague d'éradication des idées discordantes durant la Dynastie Qin, plus de deux siècles après la mort de Confucius. Ce qui est parvenu de sa pensée jusqu'à nous est donc limité.

Cependant, il est possible d'esquisser les idées de Confucius à travers les fragments qui restent. Confucius était un homme de lettres, qui se préoccupait des temps troublés qu'il vivait et allait de place en place en essayant de répandre ses idées politiques et d'influencer les nombreux royaumes luttant pour la domination de la Chine. L'affaiblissement de la Dynastie Zhou avait créé un vide, rempli par des petits États luttant pour le pouvoir. Intimement persuadé qu'il avait une mission, Confucius promouvait infatigablement les vertus des anciens rois et politiciens illustres, tels que le Duc de Zhou, et s’efforça de jouer un rôle politique, acceptant même à l’occasion l'invitation de souverains à la réputation douteuse comme le Duc Ling de Wei. Néanmoins, bien qu'il ait été appelé un « roi sans couronne », il n'eut jamais l'occasion d'appliquer ses idées, fut expulsé de nombreuses fois et finalement retourna dans ses terres natales pour passer la dernière partie de sa vie à enseigner.

Les Entretiens de Confucius, l'œuvre la plus proche de la source de ses pensées, relatent des discussions avec ses disciples. Ce livre est une compilation de conversations, de questions et de réponses ou d’éléments biographiques, et non pas l’exposé d'un système de pensée cohérent. N'utilisant pas le raisonnement déductif et la loi de non-contradiction à la différence de nombreux philosophes occidentaux, il recourt à des tautologies et des analogies pour expliquer ses idées. De ce fait, les lecteurs occidentaux pourraient penser que sa philosophie est confuse, ou que Confucius n'a pas d'objectif clair. Cependant il a aussi dit « je cherche une unité infiltrant tout ».

La morale confucéenne

Confucius est convaincu que la réforme de la collectivité n'est possible qu'à travers celle de la famille et de l'individu. 
Les hommes de l'Antiquité, dit-il, « qui voulaient organiser l'État, réglaient leur cercle familial ; ceux qui voulaient régler leur cercle familial, visaient d'abord à développer leur propre personnalité ; ceux qui voulaient développer leur propre personnalité rendaient d'abord leur cœur noble ; ceux qui voulaient ennoblir leur cœur rendaient d'abord leur pensée digne de foi ; ceux qui voulaient rendre leur pensée digne de foi perfectionnaient d'abord leur savoir ».

Selon Confucius, la vertu est une richesse intérieure que tout homme peut acquérir, étant donné que la nature humaine n'est ni bonne ni mauvaise ; aussi tout homme a-t-il la possibilité de devenir un sage, ou de se comporter comme un sot.


Series 1, No. 2 (1990-1992) - Fang Lijung.

L'artiste chinois Fang Lijun (né en 1963) illustre bien cette vision du monde lorsqu'il commente ses tableaux qui représentent des hommes hybrides surdimensionnés, pour la plupart rasés, ayant perdu leur individualité, dont on ne sait s'ils rient ou pleurent :
« Ces hommes sont comme des billes qui roulent et changent immédiatement de direction lorsqu'elles rencontrent le moindre obstacle ; ou bien ils sont comme des billes immobiles qui commencent à rouler à la moindre inclination. Les hommes ne sont ni cruels ni bons ; leur comportement dépend toujours des circonstances dans lesquelles ils agissent ».

Confucius, dans la société, répartit les hommes en trois groupes
Les hommes parfaits (shèngrén), ou sages, représentent le modèle qu'il faut suivre une fois que l'on a atteint le degré de perfection le plus élevé, comme ce fut le cas, par exemple, des Empereurs de la Chine ancienne. Puis, viennent les nobles, ou les hommes supérieurs (jūnzi). Enfin les hommes communs constituent le peuple.

La finalité de la morale confucéenne est la noblesse spirituelle : ce que l'on attend d'un noble, d'un homme supérieur, c'est qu'il trouve le li.
Ce terme désigne un concept très complexe qui peut se définir comme l'harmonie entre l'homme et l'ordre général du monde dans tous les aspects de la vie, depuis l'observation des rites religieux gouvernementaux et familiaux jusqu'aux règles de comportement de vie en société.
Le li, donc, guide l'homme dans ses devoirs aussi bien envers les autres hommes (respect, tolérance, pardon, fidélité, dévouement, confiance, contrôle de soi) qu'envers les êtres spirituels supérieurs (le culte rendu aux divinités et aux ancêtres).

En outre, Confucius a accordé un rôle très important à la musique, synonyme d'ordre et d'harmonie, et d'expression de sentiments nobles et élevés. La musique classique confucéenne, avec ses instruments, existe encore aujourd'hui en Asie, principalement en Corée.

L'autre thème principal de cette philosophie humaniste, avec la puissance ordonnatrice qu'est le li, c'est le ren (l'humanité, la bonté), si l'on veut dire par là "bienveillance qu'un homme doit montrer envers ses semblables", mais selon une hiérarchie des liens politiques et familiaux très précise. Le ren est la vertu parfaite, mère de toutes les autres.

De fait, à la lumière de l'analyse de la littérature classique confucéenne qui doit être considérée comme le support des préceptes confucéens, il apparaît clairement que le confucianisme a servi dans l'histoire de l'Asie de l'Est d'outil politique pour les gouvernants permettant la constitution de barrières hermétiques entre les divers groupes sociaux, mais a particulièrement institué un ordre hiérarchique très marqué au sein même du cercle familial, où l'épouse doit être soumise aux ordres de son mari, à qui elle doit témoigner quotidiennement son respect et sa gratitude.

Ainsi, selon la morale confucéenne, dans cette même dynamique de pacification du corps social, d'ordre et d'harmonie, les enfants se doivent d'être obéissants à leurs aînés et faire preuve en toute situation de piété filiale ("aimer ses parents").

Plus globalement, le confucianisme permet l'émergence d'une classification verticale très poussée des couches de la société, érige en tant que dogme l'obéissance aux puissants, et contribue à placer au centre l'homme, la femme n'ayant que peu voix au chapitre au regard des textes classiques.

7 commentaires:

  1. C' est incroyable , à titre personnel, tes poèmes me parlent comme si on était du même sang , mais alors par contre, cette sagesse philosophique que j' admire est aux antipodes de ma sensibilité, tu arrives à gérer tes passions, toi?

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  2. @Orfeenix : je pense comme toi que nous sommes de la même lignée de sang poétique, c'est une évidence.;-)
    Mais le confucianisme n'est pas une passion personnelle, mais revêt pour moi un intérêt anthropologique, socio-culturel pour comprendre ce qui peut amener au rejet social ou à l'abandon d'enfants du fait de ce confucianisme en Corée, au Vietnam et en Chine (raisons de séparation étudiés lors de ma thèse de doctorat, et dont Maitre Jean Vital parlera officiellement à Marseille la semaine prochaine.. To be continued...).

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  3. J'ai vecu 6 ans en Coree. Le respect pour les personnes agees est la bas evident. La societe est extremement hierarchisee, codifiee
    (moins qu'au Japon dit on, mais c'etait deja gratine!).
    Je me souviens d'une apres midi, je me promenais avec mes 2 fils (un femme qui a reussi sa vie) et mon pere aux cheveux blancs. Jamais dans ma vie je n'ai autant ressentie le poids de l'approbation sociale, je representais tout ce qu'on pouvait souhaiter d'une femme: genitrice de males, fille attentive et respectueuse. C'etait dangereusement grisant.
    La logique du conficianisme, c'est aussi la preference pour des methodes d'apprentissage "par coeur" ou l'esprit critique n'est pas encourage. Ceci etant, economiquement, ca leur reussit!

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  4. Comme dans toutes les pensées, philosophies, il y a des choses à prendre, et d'autres à laisser, je trouve. Quel type d'homme es-tu toi ? Un sage, un noble ou un homme commun (mon Dieu un homme commun ! bouuuh !!) ;o)

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  5. @Bombay Magic : notre société aurait beaucoup à apprendre de ces sociétés d'inspiration confucianiste quant au respect, à la considération et à la prise en charge de ses aïeux (idem dans les sociétés d'inspiration musulmane, où les aïeux ont une véritable considération, sont honorés, et sont le plus souvent pris en charge en intrafamilial).
    Je serai plus nuancé quant au regard sur les métis ou les "illégitimes", même si cela est évolutif, comme en Corée, et comme en France depuis la deuxième moitié du XXe siècle seulement (surtout depuis les années 70, avec la possibilité légale de divorce par consentement mutuel par exemple, et le plus grand brassage ethnique de personnes de couleurs de peau différentes).
    Pour les enfants adoptés coréens, les coréens de souche considéraient ses enfants comme des bananes, atteints du syndrome de la banane, ni pleinement coréens , ni pleinement étrangers : jaunes à l'extérieur mais blancs à l'intérieur.
    Mais il y aurait de quoi parler pendant des heures, Bombay... Merci pour votre commentaire en tout cas !

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  6. @Joufflette : c’est gentil de venir commenter sur ce blog aussi, Miss Chapo !
    Pour répondre à ta question, je dirai que dans l’idéal baptismal chrétien, je voudrais être à la fois Prêtre, Prophète et Roi, mais ce n’est pas gagné du tout, tu t’en doutes…
    Disons que je souhaite être un homme normal, noble dans sa sagesse, et sage avec noblesse…
    En tout cas, c’est gentil de ne pas m’en vouloir d’avoir réduit en pâté des chats… (voir sur mon blog de poésie au lien suivant :
    http://hors-de-ce-monde.blogspot.com/2011/05/vers-de-tiers-des-chats-bada-pour.html

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  7. Oui j'ai connu en Coree des "coreents adoptes a l'etranger", qui avaient souhaite revenir en Coree pour "revenir a leurs racines". Avec pour certains de vraies deconvenues. Ils etaient consideres avec plus de mefiance encore que l'etranger. Ils devenaient parfois tres virulents vis a vis de ce pays dont ils avaient tant reve et qui ne les reconnaissaient pas.
    Oui, en Coree le sens de la collectivite est remarquable, ca fait d'ailleurs la force du pays. En meme temps, lorsqu'on a ete eleve a la sauce de l'individualisme occidental, c'est parfois pesant!
    Mais oui, il y aurait de quoi en parler pendant des heures!

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