dimanche 13 février 2011

Symbolo - Philtres d'Amour... Mode d'emploi...

                                                Tristan et Yseult partageant le philtre d'amour

Les philtres (du latin philtrum, emprunté au grec philtron, dérivé de philein), employés pour inspirer l'amour et le désir sexuel, ou ayant simplement certains effets, remontent à la plus haute Antiquité. Leur thème a une "dimension qui embrasse toute une culture" (Cahné).


Les exemples abondent dans la littérature gréco-latine.

Chez Homère (Odyssée, X), Circé donne aux compagnons d'Ulysse une "drogue funeste" avalée d'un seul trait qui les change en porcs. (Tiens donc...) Cependant, si le philtre préparé par Circé relève de la mixture mêlant du miel vert, de la farine à une herbe enchanteresse, il arrive que les philtres nécessitent, pour être efficaces, des pratiques criminelles. Nous renvoyons à tel poème d'Horace (65-8 av. J.C.) qui montre la sorcière Canidie tirant du foie et de la moelle desséchés d'un enfant, préalablement condamné à mourir d'inanition, de quoi fabriquer un philtre d'amour (Y a de quoi rester seul dans ses conditions macabres...). Le sacrifice de jeunes enfants se retrouve dans d'autres témoignages. A preuve Cicéron (C pô carré... Désolé) (106-43 av. J.C.) plaidant contre Vaticinius accusé de sacrifier aux dieux infernaux les cadavres de jeunes enfants pour composer des philtres.
Il n'est que de lire Apulée (m. en 175 apr. J.C.) pour se persuader de l'intérêt grandissant des Romains pour les philtres. (le café n'est pourtant pas encore inventé...)  
Nicandre (IIe s.) évoque entre autres un philtre dans lequel entre le suc de pavot, qui donne à celui qui le boit l'aspect de la mort. Shakespeare s'en souviendra dans Roméo et Juliette.

L'engouement pour les philtres connut une manière d'apogée sous le règne de Néron. Leur efficacité reposait sur la théorie des sympathies et des antipathies, dans la mesure où les plantes qui les composent obéissaient à cette loi de la sympathie. Plus tard, Balthazar Gracian (1601-1658) expliquera que l'attirance se communiquait entre deux personnes, à leur insu, par l'emploi d'une plante propre à établir entre les deux êtres "une parenté de cœur et de génie".

Outre leur nature à déclencher le désir amoureux, les philtres provoquent également des hallucinations, des hébétements et bien d'autres effets nocifs. On estime au Moyen Âge qu'ayant pour base des plantes toxiques (la jusquiame, la belladone, la mandragore), ils troublent les sens, annihilent toute volonté et changent même les hommes en bêtes. C'est aussi à cette période que la notion de philtre se métamorphose. Le philtre devient, par ex. dans le Tristan et Yseult de Béroul, le révélateur de l'expérience passionnelle, liée au péché et à la folie. S'il reste, comme chez Virgile ou Homère, une préparation de sorcellerie, il constitue désormais un breuvage, un "vin herbé", évoquant par là même une perte de contrôle plus générale. Il implique le venin, et la mort clôt la légende, dans le Tristan comme dans Shakespeare.


Les philtres d'amour, rendus célèbres par la légende celtique de Tristan et Yseult, étaient déjà fréquemment utilisés dans l'ancienne Rome, où on en faisait "un commerce fort lucratif". Ils furent en faveur durant tout le Moyen Âge, époque à laquelle ils étaient rangés dans la catégories des ensorcellements diaboliques.

Ces philtres magiques pouvaient être composés de plantes, de métaux, de reptiles, de poissons, mais aussi de morceaux d'hosties consacrées (Jésus Marie Joseph!!!!), de semence masculine (bon appétit... 10 CC je suppose ?), d'excréments (je vais vomir...).
Sans oublier des cheveux, des rognures d'ongles, etc., de la personne à charmer. (avec une telle composition, la personne à charmer - courageuse ou inconsciente d'avoir bu - devait s'évanouir d'écoeurement...Trop fort le philtre d'amour...)

Les philtres d'amour doivent être composés de préférence, dit-on, le vendredi, jour de Vénus, de midi à treize heures, de dix-neuf heures à vingt heures, et de deux heures à trois heures du matin ; la période propice est "celle pendant laquelle la Lune parcourt les dix premiers degrés du Taureau ou de la Vierge et forme un aspect favorable avec Saturne et Vénus." (C'est donc pas gagné...)


[Sources : SALLMANN JM , Dictionnaire historique de la Magie et des Sciences Occultes, Librairie Générale Française, Paris, 2006 ;
MOZZANI E, Le livre des Superstitions, Robert Laffont, Coll. Bouquins, Paris , 1995]

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