vendredi 20 mai 2011

Adoption et homoparentalité - Repères et points de discussion...

Zeus séduisant Ganymède
Quelques repères mythiques, historiques et anthropologiques succincts à propos de l'homosexualité

 L'homosexualité est condamnée et rejetée depuis des siècles et dans la majorité des sociétés du monde , à quelques rares exceptions près (comme chez les Baruyas de Nouvelle-Guinée, etudiés par l'anthropologue français Maurice Godelier, dont je vous conseille la lecture de Métamorphoses de la parenté, Editions Flammarion, Paris, 2010 , ou le visionnage d'une de ses conférences : http://www.meshs.fr/page.php?r=47&id=466&lang=fr)

Le mythe de Ganymède (d'où dérive le terme anglo-saxon de Gay) chez les Grecs rend compte d'une relation homosexuelle de ce dernier, le plus beaux des mortels séduit par Zeus incarné en aigle, et devenu échanson des Dieux.

L’homosexualité était acceptée dans les sociétés antiques grecques et romaines sous certaines conditions : elle devait concerner les hautes classes sociales, et devait rester dans le respect de leur statut, à savoir ne pas faire de scandale ou d’affichage publics et ne pas s’abaisser au rang d’esclave (être passif).

L’hétérosexualité est une norme sociétale et religieuse plus ‘universelle’ pour plusieurs raisons, dont principalement la nécessité de perpétuation des générations (la procréation en dehors du rapport hétérosexuel étant une possibilité très récente).

L’homosexualité subit la condamnation religieuse : elle est punie de mort dans les pays de droit coranique, et également dans le Moyen Âge chrétien et dans la Loi juive. 

L’homosexualité fait partie des interdits sexuels de l’Eglise chrétienne. Mais l’Eglise chrétienne a déjà mis de l’eau dans son vin en ce qui concerne les divorces, les enfants hors mariage, les mariages de degrés plus rapprochés etc.

Mais même au Moyen Âge et à la Renaissance, une homosexualité des rois était tolérée, sous forme de « mignons »…

Il faut également savoir que l’homosexualité était considérée jusque dans les années 50-60 comme une pathologie psychiatrique, inscrite au DSM II (classification internationale des maladies en psychiatrie).

Il existe des sociétés où l’homosexualité fait partie intégrante du fonctionnement sociétal . C’est le cas des Baruyas de Nouvelle-Guinée, où l’homosexualité est un rite de passage obligatoire pour tous les enfants masculins afin d’affirmer leur masculinité…

Dernier point, il existe dans le taoïsme (voie du Tao, du Non-Agir) un Tao du sexe homosexuel qui permet, au même titre que le Tao du sexe hétérosexuel, d’atteindre une forme de béatitude spirituelle…

Adoption par un couple homosexuel :quelques points de discussion

Le but de l'adoption est de donner une famille à un enfant. Il n'y a pas de droit à l'enfant. 
Il faut donc prendre en compte ce qui est ou non considéré comme famille.

L'argument contre l'adoption par des homosexuels qui dit que naturellement les homosexuels ne peuvent pas avoir d'enfants, et que donc ils ne sont pas en droit de pouvoir adopter, n'est pas valable : ce serait nier l'adoption par des couples stériles, qui naturellement ne peuvent pas avoir d'enfants. Sauf si vous êtes contre l'adoption tout court...

L'argument qui est de dire que les enfants avec des homoparents seraient à risque de déviances sexuelles est faux : c'est considérer l'homosexualité comme une maladie (pour les avant 60's éventuellement...) ... Or, la quasi-totalité des homosexuels ont des parents hétérosexuels, donc pas de reproduction du schéma sexuel parental pour le coup, l'homosexualité se détermine en dehors du modèle sexuel parental. Et les déviances sexuelles de quelqu'un ne se définissent pas uniquement en fonction de la sexualité des parents.

Et puis, concernant l'absence d'un "sacro-saint référent" du sexe opposé, faut-il forcément le trouver au sein des parents ? Et ces parents doivent-ils être forcément des deux sexes ?
Que dire alors des parents célibataires, par choix, par veuvage ou par divorce, où le référent parental est de même et unique sexe, ou des enfants de parents séparés qui passent plus de 80% de leur temps effectif chez un seul parent sans forcément d'existence de "beau"-parent ?... S'indigne-t-on de cela ? Non depuis peu, les mentalités ont évolué, ces cas devenant statistiquement de plus en plus courants depuis les années 70, ils ne sont plus regardés comme pathologiques ou bizarres...
Je rappelle ici que le législateur français ne reconnait aucun statut légal au "beau"-parent de famille recomposée, défini en anthropologie par le terme plus juste de pseudo-parent ou parent fictif : on lui demande de remplir les fonctions de responsabilité et d'autorité parentales, sans qu'on ne lui reconnaisse un statut légal de parent (logique dans une société de monogamie hétérosexuelle à familles nucléaires, qui dérive vers des structures de sociétés dites "primitives", ça fout le bordel... Ce qui peut intéresser et amuser les anthropologues au passage...)

Et que dire également des orphelins de père des très nombreuses guerres de l'histoire pris en charge par des personnes du même sexe, leurs mères veuves et éventuellement leurs tantes ou leurs sœurs ? Les guerres et les morts de guerre ont été si fréquents et si nombreux (je prends l'exemple des guerres car elles tuent plus d'hommes que de femmes ou d'enfants a priori) qu'il serait bien difficile dans les généalogies biologiques de ne pas retrouver de cas d'orphelins de père élevés par une ou plusieurs femmes.

A l'inverse, si un couple homoparental ne voit dans l'adoption qu'un moyen d'affirmer et de revendiquer un droit à l'enfant, ce n'est pas le but, indépendamment du type de couple : désir d'enfant, projet parental doivent primer avant une revendication de lobbying et de droit à l'enfant à tout prix...
Et cela est vrai quel que soit le type de sexualité du couple.

Le risque qui pèse sur l'enfant adopté de parents homosexuels est plus extrafamilial qu'intrafamilial : le regard des autres et le poids social. 
 Notre société a déjà du mal à assimiler le phénomène de l'adoption, elle n'est pas encore prête à accepter des familles homosexuelles créées par filiation adoptive. Et quelques buzz ou émissions libres et tolérantes sur le sujet ne sont pas représentatives de la mentalité du français moyen ou de la cour de récréation...

7 commentaires:

  1. Personnellemt, je suis pour la legalisation de l'adoption par les couples homosexuels. Ou au sens plus large, la reconnaissance de la parentalite.
    Je pense egalement que cela protege l'enfant. Je connais des cas de couples homosexuels avec enfants: des femmes surtout qui passent par Amsterdam et font des fiv. L'une est mere "naturelle", biologique, l'autre aux yeux de la loi n'est rien. Imaginons que le couple plus tard se separe ? Comment garantir la perenite du lien entre l'enfant et l"autre mere" ?
    A voir, a revoir, le tres beau film: "The kids are alright"

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  2. Il vaut mieux un couple homosexuel stable qu'un couple hétéro complètement flingué dans sa tête.

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  3. Joufflette : Il n'y a aucune raison qu'un couple homo soit plus equilibre et stable qu'un couple hetero, un couple reste un couple, avec toutes ses difficultes.
    Tres bonne analyse, je suis tres partagee sur cette question, ma reserve vient du dernier point : le poids du regard des autres, ce n'est pas rien pour un enfant qui doit deja vivre sa difference d'enfant adopte, de couleur de peau...

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  4. Le législateur français a du pain sur la planche en ce qui concerne la définition de famille actuellement.
    Quid de considérer un couple de parents indépendamment de leur sexe ?
    Quid surtout du poids ambiant de l'homophobie dans notre société.

    Et mon billet pointe là où se situe pour moi le gros des difficultés : le poids social et le regard des autres, qui peuvent être ravageurs...

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  5. Dossier homoparentalité et adoption

    En Belgique, le débat en 2005 et 2006 sur l'adoption par les couples homosexuels a divisé les députés belges mais aussi l'opinion des citoyens majoritairement défavorable!

    Les députés ont voté par 77 voix contre 62 un texte autorisant les couples homosexuels, qui peuvent se marier en Belgique, à adopter des enfants. Il y avait 7 abstentions et 4 absents.
    La loi a donc été votée de justesse.

    Adopter à l'étranger ? C'est de la poudre aux yeux!

    Les lois sont une chose, les mentalités en sont une autre.

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  6. je suis d'accord sur la réserve concernant le jugement de la société, ceci-dit cela peut bien se passer, j'ai le souvenir d'un témoignage dans ce sens dans le magazine Elle l'année dernière
    brigitte

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  7. Bonjour Julien

    Je suis arrivé sur votre site à partir de celui du Dr JV Monléon qui relatait ses réticences concernant l'adoption par les célibataires et les couples homosexuels.

    La lecture de cette note : http://cultures-et-chabada.blogspot.fr/2011/05/adoption-et-homoparentalite-reperes-et.html m'a beaucoup plu. Je l'ai trouvée équilibrée, rationnelle et surtout sans verser dans la stigmatisation. Vous avez raison, les homosexuels, qu'ils soient en couple ou célibataires, élèvent déjà des enfants. Il faut donc partir du fait que les enfants n'ont pas à pâtir de la situation et je serais vraiment heureux que mon compagnon puisse légalement devenir parent des trois enfants que nous élevons ensemble, ne serait-ce que pour renforcer la sécurité administrative et juridique des enfants en cas de décès de ma part, car je suis le seul parent légal.

    Nos enfants sont encore jeunes mais comprennent très vite qu'ils ne sont pas dans un schéma "classique". Ils sont à ce jour épanouis, ils savent qu'ils sont aimés, mais ils ne vont pas manquer de nous poser des questions, ce qu'ils commencent déjà à faire.

    Notre crainte n'est pas tant dans notre rôle de parents que dans le regard que la société va poser sur nos enfants. Nous avons fêté deux anniversaires ce samedi, à la maison, en invitant les copains, copines de l'école, en nous demandant si les parents allaient accepter compte tenu de l'"originalité" de notre famille. nous avons été agréablement surpris car presque tous les enfants invités ont répondu présent !

    Nous verrons bien comment vont se passer les années qui viennent car il est sûr qu'à l'adolescence, cela risque d'être un peu plus compliqué, pour eux, comme pour nous parents.

    Encore bravo pour la qualité de votre site et merci d'avoir évité de tomber dans certains clichés même si les inquiétudes suscitées par cette évolution de la société (que d'aucuns qualifieront de régression) sont tout à fait légitimes.

    Je mets en lien ce beau texte de Maurice Godelier pauru dans le Monde :
    http://www.lemonde.fr/societe/article/2012/11/17/l-humanite-n-a-cesse-d-inventer-de-nouvelles-formes-de-mariage-et-de-descendance_1792200_3224.html

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