En dépit des transformations
qu'elle subira, notamment au VIe siècle
sous Justinien, la distinction entre
l'adoptio minus plena (adoption
simple) et l'adoptio plena (plénière),
l'adoption ne sera jamais conçue comme
une œuvre de charité : elle permet principalement au pater familias de renforcer la puissance de la domus qu'il dirige, notamment quand
l'absence de descendance met celle-ci en danger.[1]
Justinien - Mosaïque de la Basilique San Vitale de Ravenne. |
Adoption simple (adoptio
minus plena) et adoption plénière (adoptio
plena) sous Justinien[2]
Sous l'empereur
byzantin Justinien (qui
régna de 527 à 565 après JC), la pratique de l'adoption a été modifiée en limitant l'adoption
plénière (adoptio plena) aux ascendants naturels (un grand-père par exemple), et en introduisant
l'adoption simple (adoptio minus plena) pour les parents adoptifs qui n'étaient pas parents
par le sang.
L'adoption plénière
créait un lien irrévocable équivalent à
la filiation naturelle, et avait pour effet de mettre fin définitivement aux liens légaux parent-enfant pré-existants.
La personne adoptée acquérait les mêmes droits qu'un enfant naturel
à hériter des biens des parents adoptifs. En outre, les droits
acquis par ce type d'adoption étaient étendus aux descendants de la personne
adoptée.
En revanche, l'adoption
simple ne touchait pas aux droits du
père de naissance, même si un fils
ainsi adopté avait un droit de
succession des biens de son père adoptif, si le père adoptif décédait sans
laisser de testament.
La législation moderne
sur l'adoption de plusieurs pays, par exemple, l'Argentine, la France et Madagascar, préserve la distinction entre adoption plénière et
adoption simple.
La nature de l'adoption dans le droit byzantin[3]
L'idée récurrente que l'on rencontre dans les textes byzantins portant sur l'adoption, est que - selon
un précepte provenant des Institutes
1.11 § 4 - l'adoption doit imiter la
nature, adoptio naturam imitatur.
Comme les romanistes modernes l'ont bien discerné, depuis Justinien,
« en partant de cette idée » et « conformément aux conceptions helléniques, on
voit [dans l'adoption] un moyen de donner
un fils ou une fille aux citoyens qui n'ont pas d'enfants : on a cessé de la considérer comme une institution
destinée à augmenter la puissance d'une famille ».
Selon ce concept, la distinction
principale entre l'adrogation (adrogatio,
arrogatio) et l'adoption
proprement dite (adoptio) du droit
classique, distinction qui est déjà en recul chez Justinien, l'est bien
davantage en droit byzantin propre ; d'autant plus que dans la langue grecque
utilisée dans les Basiliques, il
n'existe pas de termes différents pour
distinguer les deux institutions, toutes les deux désignées du même nom
général d'adoption (hyiothesia).
C'est ainsi que la distinction opérée par le Digeste (1.7.1 § 1 : Quod adoptionis nomen est quidem generate,
in duas autem species dividitur, quarum altéra adoptio similiter dicitur,
altéra adrogatio. Adoptantur filii familias, adrogantur qui sui iuris sunt,
Modestin) est rendue dans les Basiliques par la simple affirmation que l'on
peut adopter soit des personnes alieni
iuris, soit même des personnes sui iuris
(Basiliques 33.1.1), immédiatement suivie par la seule distinction que « les
personnes alieni iuris sont adoptées
devant les magistrats, tandis que les sui
iuris le sont de par l'empereur ».
La doctrine byzantine
n'insiste pas non plus, en général, sur la distinction entre adoptio
plena et adoptio minus plena d'après les catégories élaborées par la
doctrine occidentale postérieure. Il n'en reste pas moins que, dans la pratique
et dans la conscience byzantines, l'adoption
est une institution qui vise désormais, en premier lieu, à la formation d'un lien de paternité et de
parenté légales, dans l'intérêt
surtout de l'adopté, plutôt qu'à établir ou augmenter une patria potestas en faveur de l'adoptant - une notion qui d'ailleurs,
bien qu'elle subsiste même en droit byzantin, est en train de perdre de son
importance.
En ce sens, l'adoption byzantine paraît ordinairement correspondre
plutôt à une adoptio minus plena, selon la catégorisation romaniste
occidentale. À ce propos on a cité souvent deux scolies incorporées dans l’Epanagoge aucta, auxquelles on a prêté
beaucoup et même, paraît-il, trop d'importance. Ce sont, il est vrai, les rares
exemples, dans toute cette tradition, d'un type de pensée et d'attitude pragmatique.
Aujourd'hui, disent-ils en substance, que les anciens droits
de la patria potestas, à laquelle
l'adoption était étroitement liée, ont reculé, que les liens de parenté dans la
famille et le droit de la succession ont changé, qu'il n'existe plus de
distinction entre agnation et cognation, « pratiquement tout ce qui est de
l'adoption dans l'ancien droit a aussi changé », au moins tacitement : les adoptés ne sont plus sujets à la «
servitude de l'ancienne patria potestas
», les pères adoptifs ne tirent plus profit des biens des adoptés, mais
aussi l'adoption elle-même et les liens familiaux qu'elle crée ne s'éteignent
plus avec la dissolution de la patria
potestas (Ndlr : la puissance paternelle n’est plus viagère).
Références :
[1] Encyclopédie
Universalis - Panorama général de l’adoption. http://www.universalis.fr/encyclopedie/adoption/1-panorama-general-de-l-adoption/
[2] United
Nations Department of Economic and Social Affairs/Population Division, Child
adoption : Trends and Policies, New York, United Nations, 2010.
[3] PSITAKIS C, L’adoption dans le droit byzantin. In :
Médiévales, N°35, 1998, pp.21-22.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/medi_0751-2708_1998_num_17_35_1426
VOIR AUSSI :
Greek Orthodox - Glory of Byzantium - Choir of Greece
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